jeudi 22 février 2018

Konbini.


Depuis l'enfance, Keiko Furukura a toujours été en décalage par rapport à ses camarades. A trente-six ans, elle occupe un emploi de vendeuse dans un konbini, sorte de supérette japonaise ouverte 24h/24. En poste depuis dix-huit ans, elle n'a aucune intention de quitter sa petite boutique, au grand dam de son entourage qui s'inquiète de la voir toujours célibataire et précaire à un âge où ses amies de fac ont déjà toutes fondé une famille. En manque de main-d'oeuvre, la supérette embauche un nouvel employé, Shiraha, trente-cinq ans, lui aussi célibataire. Mais lorsqu'il apparaît qu'il n'a postulé que pour traquer une jeune femme sur laquelle il a jeté son dévolu, il est aussitôt licencié. Ces deux êtres solitaires vont alors trouver un arrangement pour le moins saugrenu mais qui leur permettra d'éviter le jugement permanent de la société. Pour combien de temps ? 






Une histoire assez déroutante, mais qui ne l'est pas spécialement. Konbini nous narre l'histoire de Keiko qui vit en marge des règles imposées par la société japonaise. Règles qui sont les mêmes en Europe, mais de manière plus souterraine (avoir un travail, fonder une famille, obtenir un diplôme, être utile à la société, et la liste serait longue etc). Regardez un peu la poutre qui est chez nous au lieu de celle qui se trouve au Japon. Malheur à ceux qui ne rentrent pas dans le moule afin de devenir une tarte sans aucune saveur. N'avez-vous jamais vraiment porté un jugement de valeur contre ceux qui vous semblent différents ? Tout au long de ce court opuscule, on peut découvrir Keiko qui pour elle semble avoir une vie normale, une vie qu'elle à choisie, mais qui n'est pas comprise par ceux qui sont rentrés docilement dans le moule du conformisme social. le personnage vit dans un dépouillement minimaliste, se soucie guère de certaines choses et se demande en quoi il faut être standardisé pour être accepté. 

"Les individus en marge de la société n'ont aucune intimité. Tout le monde vient nous marcher dessus, sans ménagement".  

Elle calque sont comportement à un mimétisme de ceux considérés comme normaux par la société. Se fondre dans la masse pour survivre sinon, c'est l'élimination. Et puis il y Shirasha, qui lui aussi vit de manière décalée et hors des normes imposées, mais si le premier personnage est insouciant, le second sait ce qu'il fait et pourquoi il le fait. 

"Les gens perdent tout scrupule devant la singularité, convaincus qu'ils sont en droit d'exiger des explications". 

Et puis, il y a l'entourage, conditionné, inquiet, préoccupé par les questions de mariage, de position sociale et de travail.  

"On a pas le droit à la différence. Pourquoi n'as-tu toujours qu'un petit boulot, à trente-cinq ans passés ? Pourquoi n'as-tu toujours pas de relation amoureuse?" 

J'ai beaucoup aimé la manière dont l'auteur en fait une satire sociale et la manière dont les personnage changent quand ils constatent que quelqu'un sort du lot. Après tout, n'avons nous pas peur de ce qui nous est inconnu ? Un livre intéressant sur l'art de nos choix de vie et de nos difficultés à résister à la pression sociale, aux jugements des autres et du regard porté ainsi que la pression . Une ode à la différence. 

"L'endroit est régi par la normalité. Tout intrus se voit immédiatement éliminé".  

Vu le nombre d'exemplaires vendus au Japon, tout me laisse présager du nombre de personnes qui sont entrés dans le monde du conformisme aux détriments de leurs profondes aspirations.. 
   

 Konibi -  Sakaya Murata  - Editions Denoël - 128 pages - 2018 - ISBN : 978-2207137201    15€


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