Une
jeune femme de vingt-cinq ans perd la voix à la suite d’un chagrin
d’amour, revient malgré elle chez sa mère, figure fantasque
vivant avec un cochon apprivoisé, et découvre ses dons insoupçonnés
dans l’art de rendre les gens heureux en cuisinant pour eux des
plats médités et préparés comme une prière.
Rinco
cueille des grenades juchée sur un arbre, visite un champ de navets
enfouis sous la neige, et invente pour ses convives des plats uniques
qui se préparent et se dégustent dans la lenteur en réveillant
leurs émotions enfouies.
Un
livre lumineux sur le partage et le don, à savourer comme la cuisine
de la jeune Rinco, dont l’épice secrète est l’amour.
Je
ne sais pas quoi dire. Non pas que je n'ai pas aimé. Je ne sais pas
quoi dire parce que c'est beau, c'est lumineux, c'est plein de grâce,
de bonté, de beauté et il faut vraiment que je cesse de donner des
adjectifs qualificatifs sinon je vais utiliser tout le dictionnaire.
"Les
souvenirs les plus chers, je les range bien à l’abri dans mon
coeur, et je ferme la porte à clé. Pour que personne ne me les
vole. Pour les empêcher de se faner à la lumière du soleil. Pour
éviter que les intempéries les abîment".
La
lecture de ce bouquin fut un moment teinté de douceur dans un monde
qui ne tourne plus rond. Tout comme Rinco qui cuisine lentement et
avec amour, j'ai lu ce roman avec lenteur et amour aussi. Je l'avoue.
Cette histoire est une histoire que l'on lit morceau part morceau
tout comme on savoure un met délicieux ou un thé blanc aux arômes
délicats. On lit cette histoire comme on regarde un escargot
passer devant soi. Avec conscience et présence, Ce sont encore deux
adjectifs que je vais ajouter pour parler du livre, enfin de son
contenu même si l'image symbolique est aussi jolie que le contenu.
"L’amour
n’a pas besoin d’artifices, alors j’ai simplement ajouté une
pincée de sel".
On
y retrouve des ingrédients qui font que le livre prend, il cuit
petit à petit, comme du riz à la vapeur, il cuit avec conscience.
Le personnage de Rinco est particulièrement attachant, car elle
représente la bienveillance, faire les choses avec amour pour les
autres. Les notions de simplicité font que cela marche, tout est
fait avec conscience, la magie est là, dans la sensation, dans les
saveurs, les odeurs, l'amour prend différentes formes et au fond
tout cet amour transforme les autres. C'est beau, cela pourrait être
perçu comme complètement bisounours ou naïf pour ceux qui sont
blasés, mais ce livre a quelque chose de magique. Peut-être que
tout cela se passe dans la coquille de l'escargot. Le bonheur
est dans les petites choses, et l'émerveillement est en soi.
"Il
me suffisait de sentir une odeur proche de celle des épices qui
imprégnaient sa peau pour que, comme le chien de Pavlov, les larmes
me montent aux yeux".
La
cuisine sert de thérapie, elle se soigne elle-même et en se
soignant elle-même Rinko soigne les maux des autres, l'amour perdu,
l'amour retrouvé, l'amour inconnu. L'amour qui fut, qui revient et
qui prend différentes formes comme l'affection pour sa grand-mère
dont l'héritage ajoute à ces petits doigts de fée culinaire, une
pincée de sel. L'ensemble du livre se lit comme une partition
musicale qui éveillera les sentiments et fera fondre la glace. Un
livre où la mélodie s'entend à travers les mots.
"Quoique
nous fassions, rien ne peut abolir le sentiment d'impuissance qui
nous assaille quand la personne que nous aimons a décidé de
partir".
J'ai
passé un moment plein d'allégresse à la lecture de ce livre qui
est pour moi, un des livres qui m'aura le plus marqué. Rinco de part
la main de Ito Ogawa sera parvenue à mettre un peu de sel et des
saveurs en m'offrant un met raffiné. Le met fut si raffiné qu'il me
sera difficile de l'oublier.