dimanche 5 août 2018

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Les tendres plaintes.

Blessée par l'infidélité de son mari, Ruriko décide de disparaître. Elle quitte Tokyo et se réfugie dans un chalet en pleine forêt où elle tente de retrouver sa sérénité. Ruriko est calligraphe. Non loin, dans un autre chalet, s'est installé Nitta, un ancien pianiste de renom devenu facteur de clavecins, un homme habité par un calme particulier qui semble absorber les sons des instruments qu'il fabrique. Bien qu'assisté chaque jour dans son ouvrage minutieux par une jeune femme prénommée Kaoru, il vit seul avec un vieux chien aveugle et sourd. Invitée en ces lieux par Kaoru, la calligraphe observe et s'interroge sur la relation du facteur et de son aide. Ainsi elle apprend que Nitta ne peut plus jouer en présence d'autrui, que seule persiste en lui la capacité de vivre avec des sons invisibles. Mais, un matin, la calligraphe surprend Nitta installé au clavecin jouant « Les Tendres Plaintes » pour Kaoru. Ecrites en 1996, « Les Tendres Plaintes » contiennent tous les éléments révélateurs de la personnalité littéraire de Yoko Ogawa. Le regard porté sur la nature, sur ses sonorités, l'intensité de ses nuits, l'indicible solitude des êtres et leurs relations fugitives donnent à cette histoire une étrange résonance : celle qui prend source au cœur de l'inconscient. 


Est-ce une fable ? Est-ce un chant ? Est-ce tendre ? Yôko Ogawa nous entraîne dans une tendre mélodie où trois êtres solitaires se retrouvent, pour des raisons différentes à chacun, dans des chalets reculés situés en forêt. Des cœurs perdus et blessés où la solitude permettra de recoudre, un jour, ses plaies. Des failles et des fragilités qui s'expriment à travers les sons d'un clavecin ou les poils d'un pinceau de calligraphie. Un chien presque aveugle observe grâce à ses autres sens les protagonistes. 
En dehors du fait qu'un triangle amoureux se forme et que les non-dits foisonnent dans une tendre mélodie qui résonne emplie de plaintes, quelques sentiments ombrageux persistent comme l'ombre arrive avant la nuit. Ce qui fait la force de ce roman est, sans conteste, le silence et l'harmonie de la nature qui est omniprésente à travers les pages. Une mélodie qui s'échappe d'une fenêtre, la pluie qui frappe un toit, le bruit de l'eau sur une pagaie, un craquement de branches, un colorisation orangée des feuilles, de la neige sur un bonnet. Nature qui agit comme un catharsis sur les trois personnages afin de clarifier leurs doutes, leurs sentiments et leurs réels besoins. 

"Qu'il s'agisse de poèmes, de drames ou d'écrits religieux, il y a un tas d'univers à fouiller. Vous n'avez pas de temps à perdre. On n'est conscient que d'une infime partie de ses capacités" 

Le temps aussi est omniprésent. Les saisons soulèvent la question du temps qu'il faut à chacun pour se réparer soi-même. A se clarifier. 

"Elle en avait peut-être besoin. De venir dans un endroit où elle ne connaît personne, où coupée du temps, sans être perturbée par des inquiétudes, des peurs ou des souvenirs intempestifs, elle peut vivre uniquement avec des sons invisibles". 

"Alors qu'elle jouait juste sous mes yeux, j'avais l'impression que le son me parvenait d'un endroit extrêmement lointain. On aurait dit qu'il contenait la mémoire d'un temps illimité auquel personne n'avait touché. Le tranchant et la douceur, la magnificence et la grâce, la pureté et l'ombre, des impressions contradictoires jaillissaient ainsi en même temps pour se fondre aussitôt en une seule". 

Ne comptez pas sur de longues et grandes actions, il n'y en a pas. Imaginez-vous sur un sentier vers une tendre balade floconneuse dans un beau komorebi. Chacun sa route, chacun son chemin. 

"Le roussissement des feuilles était descendu jusque dans le bois. Les sorbiers étaient rouges, les mélèzes avaient jauni et le contour de leurs branchages se découpait sur le ciel. Le sol était tellement jonché de glands qu'on en avait mal sous les pieds. La lumière qui parvenait jusqu'au sol humide était fragile". 

Yôko Ogawa, nous offre une jolie analyse de la solitude humaine.  

"Le marais qu'ils portaient en leur cœur était trés profond. Pendant que les mots remontaient à la surface, ils perdaient leur signification et il n'en restait plus que des résonances". 
"Kaoru ne perdrait pas Nitta. C'est ce que j'ai compris à ce moment-là. Même couvert de sang, même sans ses doigts, il serait toujours près d'elle à travers le son d'un clavecin. Et je ne pourrais jamais effacer cela".  

"Ici, protégée par le calme, je me dis que ce serait tellement bien si je pouvais rester tout le temps dans cette paix qui me donne l'impression d'être acceptée pour ce que je suis. Mais c'est certainement impossible; Tout le temps, c'est une expression qui n'a aucun sens dans notre monde, n'est-ce pas ?"   

Yôgo Ogawa – Les tendres plaintes - Littérature japonaise – Éditions Actes sud / Babel poche - 2014 – 240 pages – ISBN : 9782330034429





  








mercredi 21 mars 2018

Le petit joueur d'échecs



Un petit garçon né avec les lèvres scellées vit aujourd'hui avec un léger duvet sur la bouche, une hypersensibilité à tout déplacement d'air. Après la disparition de sa mère, il passe de longs moments sur la terrasse d'un grand magasin, là où serait morte l'éléphante Indira. On dit que ce bel animal, mascotte d'un lancement promotionnel, devint un jour trop gros pour quitter les lieux.
L'homme, passionné par les échecs, va faire du gamin son héritier de coeur, il va lui enseigner la stratégie du jeu, tout un art auquel le jeune garçon ajoute une spécificité : il joue tel un aveugle, sans voir son adversaire, sans voir les pions...Retrouvant dans ce livre le motif du vieillard et de l'enfant, celui du lien issu d'une passion partagée, Yoko Ogawa poursuit l'exploration du sensible pour interroger, tel un écho silencieux, l'attachement à ceux qu'on aime, éternel.

Un matin, cet enfant solitaire découvre le corps d'un homme noyé dans le bleu d'une piscine. Et c'est en cherchant à savoir qui était ce malheureux que le gamin rencontre un gardien d'usine, un être obèse installé dans un autobus immobile et magique. Dès lors se dessinent entre eux une confiance quasi filiale, une relation toute familiale, un désir de legs, une envie d'héritage. 

Voici un livre dont il m’a fallu un certain temps afin de le terminer. Non pas par manque d’intérêt mais parce que je l’ai complètement grignoté, petits bouts par petits bouts, et je l’ai lu comme une véritable partie de jeu d’échecs. Les chapitres m’envoyant aux pièces demandant à être jouées. Ce livre est pour moi, une dose de douceur dans ce monde car l'histoire nous parle des attachements que nous éprouvons pour autrui et ce malgré les diverses séparations que nous côtoyons. L'histoire nous parle d'un petit garçon qui par un dramatique événement rencontre un homme obèse vivant dans un bus et qui lui apprendra à jouer aux échecs. 

"Bâtir son propre style, exprimer sa vision de la vie, se vanter de ses propres capacités, se montrer sous son meilleur jour : tout cela est totalement inutile. Tout cela ne sert absolument à rien. L'univers est beaucoup plus vaste que soi-même. Si l'on se préoccupe de son petit soi insignifiant, on ne peut pas véritablement jouer aux échecs. Libéré de soi-même, en dépassant le sentiment de vouloir gagner, on voyage librement dans l'univers des échecs...Si l'on peut faire cela, c'est merveilleux, n'est-ce pas ? " 

Il faut bien l’avouer que tous les personnages sont particulièrement attachant entre le petit joueur d’échecs a la bouche duvet, de la grand-mère et son chiffon à la petite Mirai avalée entre les murs en passant par Pion et l'homme obèse dans le bus. Tous les personnages sont attachants comme des pousses de bambou et au fur et à mesure que l'on tourne les pages, la magie de l’autrice se fait ressentir, enveloppant le lecteur dans le duvet. 

"Sur quels critères son adversaire avait-il été choisi parmi les membres du club ? C'était une chose incertaine, mais le garçon vit tout de suite qu'il était assez fort. Alors que, concentré sur l'échiquier comme si les autres n'existaient pas, il ne bougeait pas un sourcil, ce qui lui donnait l'air insolent, quand il déplaçait une pièce, sa trajectoire était pleine d'élégance et de beauté. Ses doigts fins et souples, débordant de confiance en soi, avaient l'air d'un décor commandé en harmonie avec le remarquable ensemble de jeu d'échecs".  


J’ai été touché par ce livre et c’est aussi à cause de cela que je ne l’ai pas lu vite parce que peut-être redoutait-je le Echec et Mat ? Qui sait ? Ou peut-être que le livre m’a aidé à replonger dans l’univers du jeu d’échecs que j’ai connu adolescent. Quoi qu’il en soit, j’ai passé un moment plein de grâce à la lecture de ce bouquin qui confirme encore plus mon grand intérêt pour la littérature japonaise dont l'auteur déploie une palette d'émotions tout à fait subtiles mais agréables. 



Le petit joueurs d'échecs - Yoko Ogawa -  Editions Actes Sud - 329 pages - 2015 - ISBN : 9782330053277 - 8,70   





 


  





jeudi 22 février 2018

Pourquoi avoir choisi comme titre de blog littéraire : une odeur de vieux livres.

Il n'est jamais évident de trouver un nom pour un blog. Le processus créatif étant ce qu'il est. Bon nombre de personnes ont déjà un nom de blog soit original que celui-ci soit court ou long. D'autres misent plus sur des choses simplistes.

Lorsque je me suis décidé à ouvrir un blog, parce qu'à la base ce n'est pas trop mon truc, il fallait que je sache où aller et étant de nature paresseuse au niveau de la rédaction lorsque ce n'est pas quelque chose d'urgent et bien je prends mon temps.

Au début, j'avais pensé à utiliser un de mes pseudos du web : « Docteur Veggie », mais cela faisait plus blog végétarien ou conseils nutritionnels. Puis m'est venu l'idée d’utiliser comme nom « a book in the moon », mais cela faisait blog pour anglophones. I am not. Un titre long ou un titre court ? Tout cela uniquement pour un titre de blog. La réponse m'est venu en allant prendre d'anciennes versions jaunies d'Agatha Christie  acheté en bouquinerie. Ceux-ci possédaient une odeur entre un mélange de vieux tabac, de renfermé et de chocolat noir, voire d'orange. Tout cela ? Comme j'ai l'odorat assez fin, la réponse est oui. C'est ainsi que je me suis décidé, au final, d'opter ce nom. Tout cela est vraiment fort passionnant, je vous l'accorde. 

Aussi ce blog étant à ses balbutiements, des hésitations sur les polices, les tailles et les couleurs sont à prévoir jusqu'à mi-mars. Et si vous trouvez des fautes grosses comme une maison ou que le sens d'une phrase semble confus, n’ayez pas peur de me le signaler. 

Konbini.


Depuis l'enfance, Keiko Furukura a toujours été en décalage par rapport à ses camarades. A trente-six ans, elle occupe un emploi de vendeuse dans un konbini, sorte de supérette japonaise ouverte 24h/24. En poste depuis dix-huit ans, elle n'a aucune intention de quitter sa petite boutique, au grand dam de son entourage qui s'inquiète de la voir toujours célibataire et précaire à un âge où ses amies de fac ont déjà toutes fondé une famille. En manque de main-d'oeuvre, la supérette embauche un nouvel employé, Shiraha, trente-cinq ans, lui aussi célibataire. Mais lorsqu'il apparaît qu'il n'a postulé que pour traquer une jeune femme sur laquelle il a jeté son dévolu, il est aussitôt licencié. Ces deux êtres solitaires vont alors trouver un arrangement pour le moins saugrenu mais qui leur permettra d'éviter le jugement permanent de la société. Pour combien de temps ? 






Une histoire assez déroutante, mais qui ne l'est pas spécialement. Konbini nous narre l'histoire de Keiko qui vit en marge des règles imposées par la société japonaise. Règles qui sont les mêmes en Europe, mais de manière plus souterraine (avoir un travail, fonder une famille, obtenir un diplôme, être utile à la société, et la liste serait longue etc). Regardez un peu la poutre qui est chez nous au lieu de celle qui se trouve au Japon. Malheur à ceux qui ne rentrent pas dans le moule afin de devenir une tarte sans aucune saveur. N'avez-vous jamais vraiment porté un jugement de valeur contre ceux qui vous semblent différents ? Tout au long de ce court opuscule, on peut découvrir Keiko qui pour elle semble avoir une vie normale, une vie qu'elle à choisie, mais qui n'est pas comprise par ceux qui sont rentrés docilement dans le moule du conformisme social. le personnage vit dans un dépouillement minimaliste, se soucie guère de certaines choses et se demande en quoi il faut être standardisé pour être accepté. 

"Les individus en marge de la société n'ont aucune intimité. Tout le monde vient nous marcher dessus, sans ménagement".  

Elle calque sont comportement à un mimétisme de ceux considérés comme normaux par la société. Se fondre dans la masse pour survivre sinon, c'est l'élimination. Et puis il y Shirasha, qui lui aussi vit de manière décalée et hors des normes imposées, mais si le premier personnage est insouciant, le second sait ce qu'il fait et pourquoi il le fait. 

"Les gens perdent tout scrupule devant la singularité, convaincus qu'ils sont en droit d'exiger des explications". 

Et puis, il y a l'entourage, conditionné, inquiet, préoccupé par les questions de mariage, de position sociale et de travail.  

"On a pas le droit à la différence. Pourquoi n'as-tu toujours qu'un petit boulot, à trente-cinq ans passés ? Pourquoi n'as-tu toujours pas de relation amoureuse?" 

J'ai beaucoup aimé la manière dont l'auteur en fait une satire sociale et la manière dont les personnage changent quand ils constatent que quelqu'un sort du lot. Après tout, n'avons nous pas peur de ce qui nous est inconnu ? Un livre intéressant sur l'art de nos choix de vie et de nos difficultés à résister à la pression sociale, aux jugements des autres et du regard porté ainsi que la pression . Une ode à la différence. 

"L'endroit est régi par la normalité. Tout intrus se voit immédiatement éliminé".  

Vu le nombre d'exemplaires vendus au Japon, tout me laisse présager du nombre de personnes qui sont entrés dans le monde du conformisme aux détriments de leurs profondes aspirations.. 
   

 Konibi -  Sakaya Murata  - Editions Denoël - 128 pages - 2018 - ISBN : 978-2207137201    15€


lundi 19 février 2018

Le chat qui venait du ciel.

Voici un roman touché par la grâce, celle d'un chat "si petit et si frêle qu'on remarquait tout de suite ses oreilles pointues et mobiles à l'extrême".
Quand un jeune couple emménage un jour dans le pavillon d'une ancienne demeure japonaise, il ne sait pas encore que sa vie va s'en trouver transformée. Car cette demeure est entourée d'un immense et splendide jardin, et au cœur de ce jardin, il y a un chat. Sa beauté et son mystère semblent l'incarnation même de l'âme du jardin, gagné peu à peu par l'abandon, foisonnant d'oiseaux et d'insectes. Tout le charme infini de ce livre tient dans la relation que le couple va tisser avec ce chat qui se fond dans la végétation exubérante pour surgir inopinément, grimpe avec une rapidité fulgurante au sommet des pins gigantesques, frappe à la vitre pour se réconcilier après une brouille. Un charme menacé, car ce qui éveille en nous la beauté et appelle le bonheur est toujours en sursis...
Hiraide Takashi, qui est avant tout poète, a insufflé une lumineuse et délicate magie à cette histoire du "chat qui venait du ciel", son premier roman, largement autobiographique.
?




Une histoire pleine de délicatesse et de poésie qui nous narre l'aventure d'un couple emménageant dans un pavillon d'une ancienne demeure japonaise. Tout s'axe principalement sur l'arrivée d'un chat sorti de nulle part à un moment précis de la vie du couple. S'ensuit alors une relation de cache-cache entre les protagonistes et le chat. Les émotions humaines sont traduites avec finesse et poésie.  

"Les aversions sont vraiment un étrange phénomène. Elles nous obligent à réfléchir aux liens particulièrement forts que nous avons dû entretenir dans une vie antérieure, mais comme l'idée seule d'avoir eu un lien nous répugne, nous avons tendance à rejeter cette pensée dés qu'elle fait mine de nous assaillir;" 

La nature est particulièrement représentée avec le jardin, les insectes et plus particulièrement le chat qui représente une forme de bonheur pour le couple. On y retrouve d'autres éléments comme l'orientation des points cardinaux qui accentuent l'effet de temps, de la vie qui s'y joue. Le temps qui passe, qui s'écoule, s'égrène est particulièrement bien omniprésent. Et dans ce temps qui passe, il y a le lien délicat et affectueux qui se créé avec le chat sortit de nulle part. Aussi fragile que délicat. Aussi affectueux que tendre.  

"Je savais que les chats n'abandonnent leur coeur qu'à leur maître, révèlent leur splendeur à lui seul". 

J'ai particulièrement apprécié la lecture de ce livre dont le récit particulièrement émotif m'a inspiré, mais qui m'a donné l'impression que l'auteur est particulièrement connecté et ancré à lui-même via la nature. On y retrouve comme à l'accoutumée, les éléments qui font de la littérature japonaise, un bijou délicat et enchanteur. Une histoire onirique, tendre, contemplative et méditative qui donne à réfléchir sur le temps qui passe et le lien de l'attachement. J'ai passé un moment particulièrement agréable et onirique, et je conseille la lecture de ce bouquin aux amoureux des chats.


Le chat qui venait du ciel - Takashi Hiraide - Editions Philippe Picquier - 130 pages - 2006 - ISBN : 978-2877308717 - 7€




vendredi 9 février 2018

Le restaurant de l'amour retrouvé.

Une jeune femme de vingt-cinq ans perd la voix à la suite d’un chagrin d’amour, revient malgré elle chez sa mère, figure fantasque vivant avec un cochon apprivoisé, et découvre ses dons insoupçonnés dans l’art de rendre les gens heureux en cuisinant pour eux des plats médités et préparés comme une prière.
Rinco cueille des grenades juchée sur un arbre, visite un champ de navets enfouis sous la neige, et invente pour ses convives des plats uniques qui se préparent et se dégustent dans la lenteur en réveillant leurs émotions enfouies.
Un livre lumineux sur le partage et le don, à savourer comme la cuisine de la jeune Rinco, dont l’épice secrète est l’amour. 









Je ne sais pas quoi dire. Non pas que je n'ai pas aimé. Je ne sais pas quoi dire parce que c'est beau, c'est lumineux, c'est plein de grâce, de bonté, de beauté et il faut vraiment que je cesse de donner des adjectifs qualificatifs sinon je vais utiliser tout le dictionnaire.

"Les souvenirs les plus chers, je les range bien à l’abri dans mon coeur, et je ferme la porte à clé. Pour que personne ne me les vole. Pour les empêcher de se faner à la lumière du soleil. Pour éviter que les intempéries les abîment". 

La lecture de ce bouquin fut un moment teinté de douceur dans un monde qui ne tourne plus rond. Tout comme Rinco qui cuisine lentement et avec amour, j'ai lu ce roman avec lenteur et amour aussi. Je l'avoue. Cette histoire est une histoire que l'on lit morceau part morceau tout comme on savoure un met délicieux ou un thé blanc aux arômes délicats. On lit cette histoire comme on regarde un escargot passer devant soi. Avec conscience et présence, Ce sont encore deux adjectifs que je vais ajouter pour parler du livre, enfin de son contenu même si l'image symbolique est aussi jolie que le contenu. 

"L’amour n’a pas besoin d’artifices, alors j’ai simplement ajouté une pincée de sel". 

On y retrouve des ingrédients qui font que le livre prend, il cuit petit à petit, comme du riz à la vapeur, il cuit avec conscience. Le personnage de Rinco est particulièrement attachant, car elle représente la bienveillance, faire les choses avec amour pour les autres. Les notions de simplicité font que cela marche, tout est fait avec conscience, la magie est là, dans la sensation, dans les saveurs, les odeurs, l'amour prend différentes formes et au fond tout cet amour transforme les autres. C'est beau, cela pourrait être perçu comme complètement bisounours ou naïf pour ceux qui sont blasés, mais ce livre a quelque chose de magique. Peut-être que tout cela se passe dans la coquille de l'escargot. Le bonheur est dans les petites choses, et l'émerveillement est en soi.

"Il me suffisait de sentir une odeur proche de celle des épices qui imprégnaient sa peau pour que, comme le chien de Pavlov, les larmes me montent aux yeux".

La cuisine sert de thérapie, elle se soigne elle-même et en se soignant elle-même Rinko soigne les maux des autres, l'amour perdu, l'amour retrouvé, l'amour inconnu. L'amour qui fut, qui revient et qui prend différentes formes comme l'affection pour sa grand-mère dont l'héritage ajoute à ces petits doigts de fée culinaire, une pincée de sel. L'ensemble du livre se lit comme une partition musicale qui éveillera les sentiments et fera fondre la glace. Un livre où la mélodie s'entend à travers les mots. 

"Quoique nous fassions, rien ne peut abolir le sentiment d'impuissance qui nous assaille quand la personne que nous aimons a décidé de partir".
 

J'ai passé un moment plein d'allégresse à la lecture de ce livre qui est pour moi, un des livres qui m'aura le plus marqué. Rinco de part la main de Ito Ogawa sera parvenue à mettre un peu de sel et des saveurs en m'offrant un met raffiné. Le met fut si raffiné qu'il me sera difficile de l'oublier.





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